Newsletter Social – Juin 2023
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- Juin 2023
FOCUS
Le projet de loi sur le partage de la valeur examinée par l'Assemblée nationale
Reprenant le contenu de l’A.N.I. sur le partage de la valeur, conclu en février par les partenaires sociaux, le projet de loi est examiné par les députés depuis le 26 juin 2023 en procédure accélérée. Voici ses mesures phare :
- Expérimentation sur 5 ans dans les entreprises de 11 à 49 salariés d’un mécanisme de partage de la valeur avec l’obligation de prévoir, après 3 exercices consécutifs permettant de constater un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires, un régime de participation ou d’intéressement, un abondement à un plan d’épargne salariale ou d’épargne retraite ou une prime de partage de la valeur (PPV).
- Entreprises d’au moins 50 salariés : négociation obligatoire sur le partage de la valeur en cas de résultats « exceptionnels », avec définition d’une augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal de l’entreprise et des modalités d’un partage de la valeur. Les entreprises déjà dotées d’un régime de participation ou d’intéressement devraient ouvrir cette négociation avant le 30 juin 2024.
- Négociation possible d’un plan de « partage de la valorisation de l’entreprise» par accord conclu selon les modalités prévues pour un accord de participation : ce plan, pouvant également prévu au niveau du groupe, permettrait de verser à tous les salariés ayant une ancienneté d’au moins 12 mois une prime plafonnée et calculée en fonction de l’augmentation de la valeur de l’entreprise ou du groupe constatée sur une période de 3 années définie par le plan. La prime bénéficierait d’une exonération de cotisations sociales et également d’une exonération d’impôt sur le revenu en cas d’affectation à un plan d’épargne salariale ou retraite.
- Modification du dispositif de prime de partage de la valeur (PPV) issue de la loi « pouvoir d’achat » du 16 août 2022 : les entreprises pourraient verser chaque année deux PPV, bénéficiant au total d’une exonération de cotisations sociales dans les mêmes limites qu’actuellement (3 000 € ou 6 000 € selon les cas). L’exonération d’impôt sur le revenu pour les salariés percevant une rémunération inférieure à 3 fois le smic annuel serait prolongée à partir du 1er janvier 2024 mais seulement dans les entreprises de moins de 50 salariés.
- Possibilité de prévoir des avances (au plus trimestrielles) sur la prime à venir en cours d’exercice dans les accords de participation et d’intéressement : le trop-perçu éventuel serait reversé par le salarié sous la forme d’une retenue sur salaire. Par ailleurs, un accord d’intéressement pourrait prévoir un salaire plancher et/ou un salaire plafond pour le calcul de l’intéressement en fonction du salaire, afin de favoriser les salariés aux rémunérations les plus basses lors de la répartition.
DUERP – nouvelles obligations en matière d’évaluation des risques
Le DUERP est conservé pendant 40 ans par l'employeur et tenu à la disposition des travailleurs, des anciens travailleurs ainsi que de toute personne ou instance pouvant justifier d'un intérêt à y avoir accès (inspection du travail, médecin du travail, etc.).
Il fera l'objet d'un dépôt dématérialisé sur un portail numérique à compter du 1er juillet 2023 pour les entreprises dont l'effectif est supérieur ou égal à 150 salariés, et à compter de dates fixées par décret, en fonctiondes effectifs des entreprises, et au plus tard à compter du 1er juillet 2024 pour les entreprises dont l'effectif est inférieur à 150 salariés.
Licenciement d’un salarié protégé déclaré inapte à son poste de travail : précisions sur le motif
Lorsqu'un salarié protégé est déclaré inapte à son poste par le médecin du travail, l'inspecteur du travail ne peut pas autoriser son licenciement pour un motif autre que l'inaptitude, même si la procédure de licenciement pour une autre cause a été engagée avant la déclaration d’inaptitude (Cass. soc., 20 déc. 2017, n° 16-14.983 ; Cass. soc., 8 févr. 2023, n° 21-16.258). Une exception pourrait donc être admise à cette règle d’ordre public, en vertu d’un arrêt du Conseil d’Etat.
En l’espèce, la salariée protégée, déclarée inapte, refuse son reclassement et est licenciée mais, faute d’autorisation administrative, ce licenciement est annulé. Le juge judiciaire ordonne sa réintégration, et l’employeur la convoque à un entretien afin de mettre en œuvre la procédure de reclassement. Mais la salariée, qui exerce un autre emploi à plein temps, refuse de s’y rendre. L’employeur engage alors une nouvelle procédure de licenciement, en invoquant un motif disciplinaire.
Le licenciement est autorisé par l’inspecteur du travail, régulièrement saisi. La salariée conteste cette autorisation devant le juge administratif, et la cour administrative d’appel lui donne raison : selon elle, les dispositions des articles L. 1226-2-1 et L. 1226-12 du code du travail font obstacle à ce que le licenciement du salarié déclaré inapte soit fondé sur un autre motif que l’inaptitude.
Le Conseil d’État, s’il approuve le principe retenu par la cour administrative d'appel, censure néanmoins sa décision : il lui reproche de ne pas avoir recherché si, en refusant de se rendre aux convocations que lui avait adressées l’employeur, la salariée n’avait pas mis ce dernier dans l’impossibilité de s’acquitter loyalement de son obligation de reclassement.
En effet, selon le Conseil d’État, dans de telles circonstances particulières, l’employeur aurait légalement pu envisager un licenciement pour un autre motif que l’inaptitude - ici, un motif disciplinaire, tenant à la déloyauté de la salariée.
CE, 12 avril 2023, Société L’Anneau, n° 458974, B.
NOUVEAUTÉS JURISPRUDENTIELLES
Afin de reconnaître la nullité du licenciement du salarié dénonçant des faits illicites dans l’entreprise auprès de son employeur, les juges du fond doivent constater que le salarié, dans le courriel dont il était fait grief dans la lettre de licenciement, avait relaté ou témoigné de faits susceptibles d’être constitutifs d’un délit ou d’un crime et que l’employeur ne pouvait légitimement ignorer que, par ce message, le salarié dénonçait de tels faits.
Les délais d’envoi des lettres de licenciement économique ne s’appliquent pas en cas de procédure collective Les délais prévus à l’article L. 1233-39 du Code du travail pour l’envoi des lettres de licenciement pour motif économique concernant dix salariés ou plus dans une même période de trente jours dans les entreprises de moins de cinquante salariés, ne sont pas applicables en cas de redressement ou de liquidation judiciaire.
La Cour de cassation confirme que l’octroi de dommages-intérêts pour licenciement nul en lien avec des faits de harcèlement moral ne saurait faire obstacle à une demande distincte de dommages-intérêts pour harcèlement moral.