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Transposition finale du paquet marques : Nouvelles mesures de protection des marques

Affaires – PI I 28/01/2020

L’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019 relative aux marques de produits ou de services (l’« Ordonnance ») qui transpose la directive (UE) 2015/2436 du 16 décembre 2015 (« Paquet Marques ») et son décret d’application n°2019-1316 du 9 décembre 2019 (le « Décret ») apportent (1) des changements juridiques notables au regard du droit des marques, notamment en supprimant l’exigence de représentation graphique de la marque, et modifient (2) certains aspects procéduraux devant l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI).

  1. CHANGEMENTS JURIDIQUES NOTABLES
  • Suppression de l’exigence de représentation graphique

En premier lieu, l’Ordonnance supprime l’exigence de représentation graphique pour déposer un signe à titre de marque.

Ainsi, le nouvel article L. 711-1 du Code de propriété intellectuelle (CPI) dispose que le signe « doit pouvoir être représenté dans le registre national des marques de manière à permettre à toute personne de déterminer précisément et clairement l'objet de la protection conférée à son titulaire ».

En pratique, cette suppression permet à des nouveaux types de signes « non-traditionnels » comme les marques sonores, multimédia, de couleur ou encore de mouvement d’être enregistrés à titre de marque à condition toutefois que leur représentation soit « claire, précise, distincte, facilement accessible, intelligible, durable et objective » (CPI, art. R. 711-1, al. 1, modifié).

Cette nouveauté a pour principal objectif d’harmoniser le régime de protection de la marque française avec celui de la marque de l’Union Européenne.

  • Nouveaux motifs de refus d’une demande d’enregistrement

Au visa du nouvel article L. 711-2 du CPI, l’Ordonnance élargit les motifs de refus d’une demande d’enregistrement.

Ainsi, à la liste de motifs de refus d’enregistrement existants (notamment les signes dépourvus de caractère distinctif, les marques usuelles, de nature à tromper le public ou encore contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs) sont ajoutés les motifs de refus ayant trait aux indications géographiques, aux appellations d’origine ou encore aux marques consistant en la dénomination d’une variété végétale antérieure.

  • Droits conférés par la marque

Par le biais de l’article L. 712-4 du CPI tel que modifié, la réforme élargit les droits antérieurs pouvant être invoqués à l’appui d’une procédure d’opposition en fournissant une nouvelle liste d’antériorités opposables incluant notamment le nom commercial, la dénomination sociale, une enseigne ou encore un nom de domaine dont la portée n’est pas seulement locale.

  • Changement substantiel en matière de preuve d’usage

Au visa du nouvel article L. 712-5-1 du CPI, l’Ordonnance impose désormais à l’opposant d’une demande d’enregistrement, sur requête du titulaire de la demande d’enregistrement, de prouver un usage de la marque antérieure pour chacun des produits et services sur lesquels l’opposition est fondée, et non plus pour un seul comme c’était le cas avant l’entrée en vigueur de la réforme.

  • Intégration de la notion « d’usage dans la vie des affaires »

Par le biais des nouveaux articles L. 713-2 et suivants du CPI, l’Ordonnance codifie la notion tirée de la jurisprudence selon laquelle le titulaire d’une marque ne peut interdire l’usage de celle-ci que dans la vie des affaires.
À ce titre, l’Ordonnance rappelle les contours majoritairement économiques du monopole d’exploitation conféré au titulaire d’une marque.

  1. ASPECTS PROCÉDURAUX

Au-delà de ces changements juridiques matériels, la réforme introduit également des modifications majeures au regard des procédures applicables en la matière parmi lesquelles on remarquera l’instauration d’une nouvelle procédure administrative en déchéance et en nullité de marques devant l’INPI, ainsi qu’un remaniement de la procédure d’opposition.

  • Nouvelle compétence de l’INPI

À compter du 1er avril 2020, conformément aux nouvelles dispositions des articles L. 716-1 et suivants du CPI, l’INPI aura compétence exclusive pour connaître des demandes principales en déchéance et en nullité de marques.
Cela confirme un renforcement significatif des compétences de l’INPI déjà amorcé par la loi n°2019- 486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte.

  • Modification de la procédure d’opposition

Outre la nouvelle liste d’antériorités opposables à l’appui de la procédure d’opposition et exposés en (1), l’Ordonnance et le Décret ont encore apporté à cette procédure des changements procéduraux.
Parmi ces changements, il est désormais prévu un allongement d’un mois du délai initial de deux mois suivant la publication d’une demande d’enregistrement durant lequel un opposant peut fournir l’exposé des motifs sur lesquels repose son opposition (CPI art. L. 712-5 et R. 712-14 modifiés).

  • Imprescriptibilité de l’action ou la demande en nullité

Le nouvel article L. 716-2-6 du CPI dispose que « [s]ous réserve des articles L. 716-2-7 et L. 716-2-8, l'action ou la demande en nullité d'une marque n'est soumise à aucun délai de prescription ».

À ce titre, le titulaire d’une marque pourra intenter une action ou une demande en nullité d’une marque sans se voir opposer une fin de non-recevoir tirée de la prescription.

Toutefois, il sera fait échec à la règle pour les titulaires de marques notoirement connues ainsi que pour les titulaires de droits antérieurs qui auraient toléré l’usage de la marque contestée pendant une durée consécutives de cinq années.

De par les changements juridiques matériels et la modification des procédures qu’elle implique, nul doute que la réforme du droit des marques aura un impact significatif majeur pour les titulaires de marques françaises.

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