Newsletter Social – Février 2024

Refus d’un CDI après un cdd : les obligations de l’employeur

Depuis le 1er janvier 2024, l’employeur qui souhaite proposer un CDI au salarié à l’issue d’un CDD ou d’une mission d’intérim doit le faire par écrit, dès lors que la proposition porte sur le même emploi ou un emploi similaire, assorti d’une rémunération au moins équivalente pour une durée de travail équivalente, relevant de la même classification et sans changement du lieu de travail.

Si le salarié refuse, l’employeur doit en informer France Travail dans le mois, au moyen d’un formulaire, par voie dématérialisée sur la plateforme accessible à l’adresse suivante : https://www.demarches-simplifiees.fr/commencer/refus-de-cdi-informer-francetravail.

Le salarié risque d’être privé de son allocation d’assurance chômage s’il est constaté que l’intéressé a refusé à deux reprises, au cours des 12 mois précédents, une proposition de CDI sur un emploi identique ou similaire.

C. trav., art. L.1243-11-1, L.1251-33-1, R.1243-11-1 et R. 1251-11-1 (pour le contrat d’intérim)

Arr. 3 janv. 2024 : JO, 10 janv.

Renforcement du contrôle des OPCO

Les OPCO peuvent vérifier l’exécution des actions de formation par un contrôle sur pièces (factures, relevés de dépenses supportées par l’employeur et certificat de réalisation établi par le dispensateur de l’action, ainsi que tout document complémentaire nécessaire pour s’assurer de la réalisation de l’action qu’il finance et de sa conformité aux dispositions légales, réglementaires et conventionnelles). Ils peuvent désormais contrôler la qualité des actions de formation.

L’OPCO peut ainsi refuser une prise en charge lorsque le prestataire de formation ou l’employeur :

– ne fournit pas l’ensemble des pièces prévues ou demandées lors d’un contrôle de service fait ;

– s’oppose au contrôle de la qualité des actions ;

– n’exécute pas une ou plusieurs actions.

Tout manquement, ou, pour les formations par apprentissage, toute incohérence entre le contenu de la formation proposée et le référentiel de compétences du diplôme concerné sera signalé par l’OPCO aux services de l’Etat chargés du contrôle de la formation professionnelle, et les manquements constatés dans l’exécution du contrat de travail de l’apprenti ou du contrat de professionnalisation seront à l’Inspection du travail.

D. n° 2023-1396, 28 déc. 2023 : JO, 31 déc. 2023

Nouvelle dérogation au délai de carence pour le versement des IJSS

Depuis le 1er janvier 2024, la salariée ayant subi une fausse couche ou une interruption médicale de grossesse peut bénéficier d’un arrêt de travail sans délai de carence, et sera donc indemnisée par la Caisse d’assurance maladie dès le 1er jour de son arrêt.

L. n° 2023-1250, 26 déc. 2023 : JO, 27 déc. L. n° 2023-567, 7 juill. 2023 : JO, 8 juill
Inaptitude : obligation de reprendre le versement du salaire malgré le refus de reclassement

Les juges d’appel avaient considéré que dans la mesure où l’employeur avait respecté les conditions posées par le code du travail en matière de reclassement, l’article L. 1226-4 du code du travail n’avait pas vocation à s’appliquer.

Erreur de raisonnement selon l’éminente juridiction qui va censurer la décision sur cette dernière inférence.

En effet, la circonstance que l’employeur est présumé avoir respecté son obligation de reclassement en proposant au salarié déclaré inapte un emploi prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail ne le dispense pas de verser au salarié, qui a refusé cette proposition de reclassement et qui n’a pas été reclassé dans l’entreprise à l’issue du délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise ou qui n’a pas été licencié, le salaire correspondant à l’emploi qu’il occupait avant la suspension du contrat de travail.

Cass. Soc. 10 janv. 2024, FS-B, n°21-20.229
Discrimination syndicale : l’étendue de la compétence du juge judiciaire en cas d’autorisation administrative de licenciement

Dans le cas où l’employeur sollicite l’autorisation de licencier le salarié, il appartient à l’administration de vérifier si la mesure de licenciement envisagée n’est pas en rapport avec le mandat détenu, sollicité ou antérieurement exercé par l’intéressé.

Par conséquent, l’autorisation administrative de licenciement établit que le licenciement n’a eu ni pour objet ni pour effet de faire échec au mandat représentatif.

Il en résulte que le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de séparation des pouvoirs, en l’état d’une autorisation administrative de licenciement devenue définitive, annuler le licenciement pour motif économique du salarié sur le fondement d’une discrimination syndicale subie par ce dernier.

Cass. Soc. 17 janv. 2024, F-B, n° 22-20.778
Temps de pause, des durées maximales de travail et du temps de repos : la charge de la preuve repose sur l’employeur.

Une salariée sollicitait la condamnation de l’employeur pour non-respect de ses temps de pause, du repos quotidien, durée maximale quotidienne de travail et durée maximale hebdomadaire au cours d’une même semaine. Alors que la Cour d’appel la déboute en considérant qu’elle n’établit pas suffisamment les manquements de l’employeur, la Cour de Cassation casse l’arrêt en jugeant que les dispositions de l’article L 3171-4 du Code du travail relatives à la répartition de la charge de la preuve des heures de travail effectuées entre l’employeur et le salarié ne sont pas applicables à la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l’Union européenne et de ceux fixés par les articles L 3121-16, L 3121-18, L 3121-20 et L 3131-1 du Code du travail.

C’est donc à l’employeur de prouver qu’il a bien respecté ces dispositions, tout manquement pouvant donner lieu à l’indemnisation du préjudice subi par le salarié.

Cass. Soc. 17-1-2024 no 22-20.193 F-D
L’avis de contrôle URSSAF non signé est valable

L’article R 243 -59 du code de la sécurité sociale ne prévoit pas que la signature de l’avis par les agents chargés du contrôle constituerait une formalité substantielle. L’absence de signature de la mise en demeure n’en affecte donc pas la validité dès lors que l’organisme qui la délivre y est mentionné.

CA Aix en Provence, 23 nov. 2023, n° 21-16
Le Saviez Vous ?

L’absence injustifiée n’est pas toujours une faute grave

La faute grave, justifiant le licenciement, et privant le salarié de l’indemnité de licenciement et de préavis, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Or, selon la Cour de cassation, l’absence injustifiée ne constitue pas une faute grave, mais uniquement une cause réelle et sérieuse de licenciement, au regard contexte tenant à l’importante ancienneté du salarié (22 ans), à son passé disciplinaire irréprochable et à la nécessité de porter assistance à sa mère âgée, malade et isolée.

Rappelons que l’employeur peut le mettre en demeure de justifier son absence ou de reprendre son poste dans un délai de 15 jours, par lettre recommandée ou remise en main propre contre décharge. A défaut, le salarié s’expose à être considéré comme démissionnaire, et dès lors privé de l’assurance chômage. (ar.L1237-1-1).

Cass. soc. 17-1-2024 no 22-24.589 F-D

Newsletter Social – Janvier 2024

Réévaluation du SMIC au 1er janvier 2024

Au 1er janvier 2024, le SMIC augmentera de 1.13%.

Le SMIC horaire passe donc à 11.65 euros, soit un minimum mensuel de 1 766.96 euros.

Réforme de la P.P.V

Le régime de la prime de partage de la valeur (P.P.V.) est modifié depuis le 1er décembre 2023 :

  • Deux primes peuvent être versées par l’employeur, ce qui était impossible jusqu’à présent.

L’employeur qui aurait donc déjà versé une PPV en cours d’année peut conclure un nouvel accord collectif, ou édicter une nouvelle décision unilatérale prévoyant le versement d’une seconde prime.

Les critères de calcul et de versement peuvent donc être différents de ceux retenus pour la première prime. Attention cependant : c’est le montant total des deux primes qui doit être pris en compte pour apprécier les limites d’exonération, qui n’ont pas été modifiées ;

  • Le régime fiscal et social fixé jusqu’au 31 décembre 2023 est prorogé jusqu’au 31 décembre 2026 pour les salariés appartenant à une société de moins de 50 salariés.

Leur P.P.V. sera donc exonérée de l’impôt sur le revenu, des cotisations salariales et des contributions sociales y compris de la CSG et de la CRDS, dans la limite de 3 000 € par an et par bénéficiaire (ou dans la limite de 6 000 euros si l’entreprise est dotée d’un accord d’intéressement ou de participation).

Les salariés dont la rémunération est au moins égale à 3 fois le Smic annuel ne bénéficient cependant pas de l’exonération fiscale ;

  • A compter du 1er décembre 2023, si le salarié ne remplit pas les conditions visées précédemment pour bénéficier du régime fiscal favorable, il pourra défiscaliser sa prime en l’affectant en tout ou partie dans un plan d’épargne salariale (PEE, PEI ou Perco s’il en existe) ou dans un plan d’épargne retraite.

L. n° 2023-1107, 29 nov. 2023, art. 9 et 11 : JO, 30 nov.

Communication de la liste des emplois en CDI aux salariés en CDD et intérimaires

Depuis le 1er novembre 2023, le salarié en CDD ou intérimaire ayant au moins 6 mois continus d’ancienneté peut demander à l’employeur, par tout moyen conférant date certaine, la liste des emplois à pourvoir en CDI dans l’entreprise.

L’employeur devra répondre sous 1 mois au plus tard, par écrit (sauf pour les particuliers employeurs ou les entreprises d’au moins 250 salariés recevant ayant déjà reçu une demande du même salarié, et si la réponse est inchangée).

Il ne pourra refuser de répondre que s’il a déjà fourni la liste des postes disponibles au salarié et que celui-ci a déjà formulé au moins deux fois sa demande au cours de l’année civile.

Décret 2023-1004 du 30 oct. 2023
Procédure liée au refus de deux offres de CDI après un CDD

Depuis le 1er janvier, l’employeur qui envisage de recruter un salarié en CDI à l’issue d’un CDD ou d’un contrat de mission doit lui notifier sa proposition en lui laissant un délai de réflexion raisonnable.

En cas de refus du salarié, il sera désormais tenu d’en informer l’opérateur France Travail (ex-Pôle emploi) dans un délai d’un mois.

Le salarié refusant deux propositions de CDI sur une période de 12 mois sera pour sa part privé de ses droits à indemnisation du chômage.

Décret 2023-1307 du 28 déc. 2023
Aide à l’embauche des alternants prolongée

L’aide exceptionnelle à l’embauche d’alternants qui arrivait à terme au 31 décembre 2023 a été prolongée au titre des contrats d’apprentissage et de professionnalisation conclus entre le 1er janvier et le 31 décembre 2024 par le décret no2023-1354 du 29 décembre 2023.

Ce dispositif, qui devrait être maintenu jusqu’en 2027, ouvre droit à une aide exceptionnelle, versée pour la première année d’exécution
Du contrat, dont le montant s’élève à 6 000 €.

Elle complète l’aide unique à l’apprentissage afin de couvrir l’ensemble des embauches d’alternants préparant une certification au plus de niveau master ou bac + 5.

Décret n° 2023-1354 du 29 déc.2023
Mode de preuve déloyale

Jusqu’alors la Cour de cassation considérait qu’une preuve obtenue à l’insu de l’intéressé ou au moyen d’une manœuvre ou d’un stratagème devait systématiquement être écartée des débats en cas de contentieux et donc être déclarée irrecevable. Elle opère un revirement à ce sujet par des arrêts en date du 22 décembre 2023.

Désormais, il y a lieu de considérer que l’illicéité ou la déloyauté dans l’obtention ou la production d’un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l’écarter des débats. Il faut ainsi que la production de preuve portant atteinte à certains droits soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi. C’est ainsi que des enregistrements clandestins ont été déclarés recevables bien que obtenus de manière déloyale. Contrairement à une preuve provenant d’une messagerie privée Facebook.

Soc. 22 déc.2023, n°20-20.648, n021-11.330 BR
Remboursement frais de carburant

Lorsque le salarié utilise le véhicule de l’entreprise, et que l’employeur ne s’est engagé à prendre en charge que les dépenses effectuées à des fins professionnelles, il peut obtenir le remboursement des dépenses d’essence exposées à titre personnel par le salarié au moyen de la carte essence mise à sa disposition.

Cass. Soc., 8-11-2023 n° 22-10.384 F-D, Sté Bouygues immobilier c/S.
Le Saviez Vous ?

Le salarié qui suit une formation pendant un arrêt de travail ne commet pas nécessairement une faute grave

Un salarié embauché en CDD par un Office du tourisme en tant que chargé de mission est placé en arrêt maladie, au cours duquel il suit une formation de personnel navigant commercial auprès d’une compagnie aérienne.

L’employeur, considérant qu’il a commis une faute grave, rompt le CDD de manière anticipée.

Or, la Cour de Cassation rappelle que l’exercice par le salarié en arrêt de travail d’une activité non concurrente à celle de l’employeur ne constitue pas en soi un manquement à son obligation de loyauté, et que faute de démontrer un préjudice – qui ne peut être caractérisé par le seul fait que l’employeur ait procédé à un maintien de salaire – l’employeur ne peut rompre le contrat de travail pour faute grave.

Cass. Soc. 6-9-2023 n° 21-24.434 F-D