Projet de loi de finances 2025

Le projet de Loi de Finances a été déposé devant l’Assemblée Nationale ce jeudi 10
octobre, ses principales mesures intéressant les entreprises et les particuliers sont
présentées ci-dessous.

FISCALITÉ DES ENTREPRISES

Contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises

Le projet instaure une contribution exceptionnelle à la charge des Sociétés dont le chiffre d’affaires
excède 1 milliard d’euros (étant précisé qu’en cas d’intégration fiscale, ce seuil d’un milliard d’euros
est apprécié en faisant la somme des chiffres d’affaires des sociétés du groupe intégré). Ce dispositif
a vocation à être temporaire, le texte prévoyant une application au titre de deux exercices clos à
compter du 31 décembre 2024.
Cette contribution serait assise sur l’impôt sur les Sociétés avant imputation des réductions et crédits
d’impôts et des créances fiscales. Aussi, cette contribution exceptionnelle ne serait pas déductible des
résultats. De même, les réductions, crédits d’impôts et créances fiscales de toutes natures ne
pourraient être imputés sur la contribution.
Le taux de cette contribution serait fonction du chiffre d’affaires de la société, à savoir :

ExerciceChiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’eurosChiffre d’affaires supérieur à 3 milliards d’euros
Pour le premier exercice clos à compter du 31 décembre 202420,6%41,2%
Pour le second exercice clos à compter du 31 décembre 202410,3%20,6%

Un mécanisme de lissage serait prévu quand le chiffre d’affaires excédentaire serait inférieur à
100 millions d’euros de chacun des seuils d’assujettissements instaurés par le texte.

Création d’une taxe sur les réductions de capital consécutives au rachat de leur propres titres
des grandes entreprises

Le projet prévoit l’instauration d’une taxe dont seraient redevables les entreprises ayant leur siège
social en France dont le chiffre d’affaires réalisé au cours du dernier exercice clos excède 1 milliard
d’euros en cas de réalisation d’une opération de réduction de capital à compter du 10 octobre 2024
consécutive au rachat de ses propres titres.
Cette taxe, dont le taux s’établirait à 8%, serait assise sur le montant de la réduction de capital et les
sommes qui revêtent sur le plan comptable le caractère de primes liées au capital.
Non déductible du résultat imposable, la taxe serait à déclarer et à acquitter lors du dépôt de la CA3.

Modification du régime fiscal de faveur applicable aux restructurations pour tenir compte des
dispositions de l’ordonnance du 24 mai 2023

L’ordonnance du 24 mai 2023 n °2023-393 a introduit en droit interne les fusions sans échange de
titres (le capital de la société absorbante et absorbée est réparti entre les mêmes associés et dans les
mêmes proportions avant et à l’issue des opérations) ainsi que les scissions partielles (opération
d’apport réalisée au bénéfice d’une société en contrepartie de l’attribution de titres représentatifs du
capital de cette société aux associés de la société apporteuse).

Le projet de Loi de Finances pour 2025 prévoit d’aménager le régime de faveur actuel des fusions afin
d’assurer une neutralité fiscale à ces opérations.

Report de la suppression progressive de la CVAE

Initialement prévue pour 2027, la suppression progressive de la CVAE serait reportée à 2030. L’article
15 du projet de loi de Finances prévoit ainsi que les taux applicables pour 2024 seraient prorogés
pour 2025 à 2027 (taux maximal de 0,28%) et que la suppression progressive serait alors décalée de
2028 à 2030.
Les taux seraient de 0,19% en 2028, 0,09% en 2029 et la CVAE serait supprimée en 2030.

FISCALITÉ DES PARTICULIERS

Instauration d’une contribution différentielle sur les hauts revenus

Serait instaurée pour les personnes physiques dont le revenu fiscal de référence est inférieur à
250 000 euros (célibataire) ou 500 000 euros pour les couples soumis à imposition commune, une
contribution différentielle à compter de l’imposition des revenus 2024 et ce pour une durée de 3
années.
L’objectif de la mesure étant d’assurer une imposition minimum de 20 % du revenu fiscal de référence
des foyers fiscaux à « hauts revenus ». La contribution serait alors égale à la différence entre 20 % du
revenu fiscal de référence et le montant des impôts (impôt sur le revenu et contribution exceptionnelle
sur les hauts revenus).
Le projet prévoit l’application d’un mécanisme afin de tenir compte de la perception de revenus
exceptionnels. Aussi, un mécanisme de décote serait appliqué aux contribuables dont le revenu fiscal
de référence n’excède pas 330 000 euros pour un contribuable célibataire et 660 000 euros pour un
contribuable soumis à imposition commune.

Revalorisation du barème progressif de l’impôt sur le revenu

Comme chaque année, les tranches du barème progressif seraient revalorisées. Le barème
applicable aux revenus 2024 serait le suivant (article 2 du projet de Loi de Finances) :

Fraction du revenu imposable (pour une part) Taux
Inférieur à 11 520 €0 %
11 520 € – 29 373 €11%
29 373 € – 83 988 €30%
83 988 € – 180 648 €41%
Supérieur à 180 648 € 45%

Définition de la résidence fiscale


Le projet de Loi de Finances fait prévaloir la notion de résident fiscal au sens conventionnel sur celle
de résident fiscal au sens de l’article 4 B du Code Général des Impôts. Cette modification
interviendrait pour couper court à une jurisprudence (arrêt du Conseil d’Etat du 5 février 2024
(n°46977)) faisant prévaloir la notion de résidence fiscale de droit interne pour l’application de la
retenue à la source sur les salaires de l’article 182 A du Code Général des Impôts.


Durcissement du régime de la location meublée


Le projet de Loi de Finances prévoit que pour les cessions à compter du 1 er janvier 2025, les loueurs
en meublés devront, pour la détermination de la plus-value immobilière, réintégrer les amortissements
pratiqués durant la période de la location du bien.


Reconduction de l’abattement fixe de 500 000 euros pour dirigeant partant à la retraite

Le dispositif, qui devait prendre fin au 31 décembre 2024, serait reconduit jusqu’au 31 décembre
2031.


Aménagement du régime des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE)


L’article 25 du projet de loi de Finances permettrait d’inscrire des BSPCE et des titres souscrits en
exercice de ceux-ci dans un PEA/PEA-PME, ou plan d’épargne salariale et d’autre part la possibilité
de bénéficier des régimes des reports ou sursis d’imposition en cas d’apport de titres acquis en
exercice des bons et ce, à compter du 10 octobre 2024.
Le projet de Loi de Finances opérerait une distinction entre le gain d’exercice, qui serait taxé au taux
de 12,8% (ou sur option selon les règles des traitements et salaires sous conditions) et aux
prélèvements sociaux, et le gain de cession qui serait quant à lui imposé selon le régime des plus-
values mobilières des particuliers.

Contacts :


Pour plus d’informations, notre département fiscalité est à votre disposition :
Charlène Mangin, Avocat Associé • c.mangin@acd.fr
Anne Charliquart, Avocat • a.charliquart@acd.fr

Affaire URGO – Contrôle DREETS – Auditions pénales

L’enquête menée par la Direction Régionale de l’Économie, de l’Emploi, du Travail et des Solidarités (DREETS, sous-direction de la DGCCRF) auprès des sociétés LABORATOIRES URGO et LABORATOIRE URGO HEALTHCARE a révélé que ces sociétés ont proposé ou procuré à des pharmaciens pendant de nombreuses années des avantages en nature en contrepartie de l’achat de produits de santé non remisés.
 
Le groupe URGO a écopé d’une amende de 6,6 M€ et plus de 5,4M€ de « cadeaux » ont d’ores et déjà été confisqués.
 
Les pharmaciens sont désormais visés à titre personnel par les services de la DGCCRF qui en fait une priorité au nom de l’efficacité sanitaire et économique du système de santé.
 
À ce jour, près de 8.000 titulaires d’officine sont concernés, soit 1 pharmacien sur 3.
 
En effet, tout comme le fait d’octroyer un avantage illégal, le fait de l’accepter est passible d’une sanction en application du dispositif « anti-cadeaux » : la sanction encourue est d’un an d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende, et peut être assortie de peines complémentaires comme l’interdiction temporaire ou définitive d’exercer ou la confiscation du produit de l’infraction (cadeaux reçus) par exemple.
 
Des sanctions disciplinaires, en raison de manquements déontologiques, peuvent également être prononcées par l’Ordre des pharmaciens ainsi qu’un redressement fiscal à propos de la non-déclaration des objets de valeur reçus.
 
Vous faites peut-être partie des pharmaciens concernés et avez été destinataire d’une convocation en vue d’une audition pénale. 
 
Ou vous souhaitez tout simplement vous mettre en conformité avec les dispositifs « anti-cadeaux » vis-à-vis de vos fournisseurs.

Une équipe dédiée a été constituée afin de vous accompagner, n’hésitez pas à nous contacter pour plus de renseignements : Mickael Munin – m.munin@acd.fr ou Pauline Barreau – p.barreau@acd.fr.

Témoignages : Procédures de sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires

Société de conseils aux entreprises, secteurs Défense, Aéronautique – 20 personnes – Résolution amiable des difficultés et mise en place d’une procédure confidentielle de prepack cession en conciliation – Jean Marc BIDON et Charline BROSSE

« Merci tout d’abord à vous deux

Vous avez suivi notre aventure chaotique depuis huit ans, et vous avez trouvé, dans les différentes phases que nous avons croisées, des mesures qui nous ont permis de tenir et de réussir cette transformation et cette issue  » par le haut ». Je pense que nous avons épuisé le catalogue des mesures possibles des procédures amiables pour sauvegarder les entreprises.

Au final, la procédure de conciliation dans sa formule de cession confidentielle (prepack cession) en l’occurrence à un groupe tiers renommé dans notre secteur d’activité aura permis de sauver l’entreprise et la totalité des emplois. Mon équipe m’a remercié d’avoir trouvé une belle solution pour elle comme pour eux.

La réussite de cette procédure est aussi une reconnaissance de leur travail, du capital intellectuel qu’ils ont créé et de leur valeur.

C’est également pour nos clients et pour le marché la reconnaissance de la confiance qu’ils ont mise en nous, alors que certains avaient conscience de notre fragilité.

Aujourd’hui, l’intégration de mon équipe et de moi-même se fait dans les meilleures conditions au sein de la nouvelle structure et j’en remercie son Président avec qui nous partageons les mêmes valeurs.

Pour achever ce courrier, merci encore très sincèrement et très fortement à vous Jean-Marc et Charline, et à vous Pierre Seguin, pour votre confiance tout d’abord [et il n’était pas évident d’y croire], à vos efforts, à votre professionnalisme, qui ont permis de réussir une issue d’une transformation très improbable. Mais comme toujours et ce qui est ma philosophie profonde de l’action, l’obstination, la volonté et le fait de croire positivement aux choses les transforme, les permet, et entraîne la conviction et la décision d’organismes aussi difficile à manœuvrer qu’un tribunal de commerce.

Témoignage de Mr JB, Président –  Mai 2015″

News Droit Social février 2023

NOUVEAUTES SUR LE BULLETIN DE PAIE

A compter du 1er juillet 2023, les bulletins de paie devront mentionner, au-dessus du montant net à payer avant impôt sur le revenu, le montant net social.

Celui-ci est égal à la différence entre :

– d’une part, la totalité des montants correspondant aux sommes, ainsi qu’aux avantages et accessoires en nature ou en argent qui y sont associés, dus en contrepartie ou à l’occasion d’un travail, d’une activité ou de l’exercice d’un mandat ou d’une fonction élective, ainsi qu’aux sommes destinées à compenser la perte de revenu d’activité, versées sous quelque forme que ce soit et quelle qu’en soit la dénomination, à l’exception des indemnités journalières de sécurité sociale, du financement patronal des contrats de frais de santé à caractère collectif et obligatoire, ainsi que du versement santé ;

– d’autre part, le montant total des cotisations et contributions sociales d’origine légale ou conventionnelle à la charge du salarié.

L’arrêté du 31 janvier fixant ses nouvelles modalités fournit un modèle utilisable de juillet 2023 à décembre 2024.


Rapprochez-vous de votre gestionnaire de paie à ce sujet !

DEPART A LA RETRAITE ET GESTES DE PREMIER SECOURS

C’est en vigueur ! L’obligation de sensibiliser les salariés, avant leur départ à la retraite, aux gestes de premiers secours est désormais effective.

Depuis la loi du 3 juillet 2020 visant à créer le statut de citoyen sauveteur, a été intégrée dans le code du travail une disposition selon laquelle « les salariés bénéficient d’une sensibilisation à la lutte contre l’arrêt cardiaque et aux gestes qui sauvent préalablement à leur départ à la retraite ».

Un décret du 19 avril 2021 est venu en fixer le contenu, le champ d’application et les modalités de mise en œuvre de cette obligation pesant sur l’ensemble des employeurs.

Il détermine notamment que c’est à l’employeur de proposer aux salariés, avant leur départ à la retraite, les actions de sensibilisation à la lutte contre l’arrêt cardiaque et aux gestes qui sauvent, qui doivent se dérouler pendant l’horaire normal de travail et être considérées comme du temps de travail.

Cette sensibilisation vise à acquérir les compétences nécessaires pour :

  • assurer sa propre sécurité, celle de la victime ou de toute autre personne et transmettre au service de secours d’urgence les informations nécessaires à son intervention ;
  • réagir face à une hémorragie externe et installer la victime dans une position d’attente adaptée ;
  • réagir face à une victime en arrêt cardiaque et utiliser un défibrillateur automatisé externe.

Il précise que peuvent réaliser cette sensibilisation les formateurs des services, associations et organismes ainsi que les professionnels mentionnés respectivement aux articles 4 et 5 de l’arrêté du 30 juin 2017 instituant une sensibilisation aux « gestes qui sauvent ».

Il prévoit également une possibilité d’adapter cette sensibilisation pour les salariés attestant déjà de certains certificats ou attestations, en cours de validité ou datant de moins de 10 ans (certificat de sauveteur-secouriste du travail, certificat de premiers secours en équipe de niveau 1 ou 2, etc.).

Cette adaptation prend la forme d’une information transmise par tout moyen sur l’importance de maintenir à jour leurs compétences.

LES CONGES PAYES EN 2023 : QUELQUES RAPPELS

L’octroi au salarié des congés qu’il a acquis constitue une obligation pour l’employeur.

Chaque salarié acquiert 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur, sans pouvoir excéder 30 jours ouvrables.  Sachant que les salariés à temps partiel ont les mêmes droits que les salariés à temps plein.

Sauf accord contraire, la période d’acquisition est celle allant du 1er juin de l’année précédente au 31 mai de l’année en cours. Pour les congés 2023, elle va du 1er juin 2022 au 31 mai 2023.

  • Les modalités de prise des congés

Le droit à congés doit s’exercer chaque année : ni l’employeur ni le salarié ne peuvent exiger le report de tout ou partie des congés sur l’année suivante, sauf cas particuliers (congé maternité par exemple).

Mais attention : le salarié doit obligatoirement prendre :

  • Au minimum, 12 jours ouvrables continus, soit deux semaines, dans la période allant du 1er mai au 31 octobre
  • Au maximum 24 jours ouvrables continu (soit 4 semaines).

La 5ème semaine de congés payés ne peut pas être accolée au congé principal.

L’ordre et les dates de départ en congés est fixé par l’employeur, après consultation du CSE s’il existe.

L’employeur doit communiquer l’ordre des départs en congés par tout moyen à chaque salarié un mois avant son départ.

L’employeur et le salarié doivent respecter l’ordre et les dates de congés qui ont été fixés.

Sauf circonstances exceptionnelles, les dates de congé ne peuvent pas être modifiées moins d’un mois avant.

Anticiper et instaurer des règles en entreprise : par quel moyen, quand, et comment ?

La note de service est un outil utile voire indispensable pour fixer les règles au sein de l’entreprise.

Si celle-ci doit être affichée au sein de l’entreprise, il faut aussi que l’employeur ait la preuve de sa remise au salarié. Pour cela, une remise en main propre contre décharge est indispensable (signature dans un tableau d’émargement par exemple).

La remise de la note doit s’effectuer courant janvier / mars dernier délai. L’employeur doit y rappeler la durée du congé principal (12 jours ouvrables consécutifs au minimum / 24 jours ouvrables consécutifs au maximum) et la période au sein de laquelle il doit être pris.

L’employeur doit surtout fixer une date butoir au-delà de laquelle les souhaits des salariés ne seront plus pris en compte pour la fixation des dates de congés, et ce, afin de satisfaire au délai légal de communication de l’ordre des départs.

Il doit de façon incontournable rappeler que la fixation des dates de congés ne relève pas de la volonté du salarié.

Et mettre à disposition du salarié un bordereau de demande de congés, qui sera ensuite retourné par la direction avec l’acceptation ou non des dates de départ.

JURISPRUDENCES

Inaptitude :

Un salarié déclaré inapte ne peut être licencié pour une autre cause que l’inaptitude.

La Cour de cassation rappelle que les dispositions en vigueur font obstacle à ce que l’employeur prononce un licenciement pour un motif autre que l’inaptitude, peu important qu’il ait engagé antérieurement une procédure de licenciement pour une autre cause.

Cass. soc., 8 févr. 2023, n° 21-16.258

Selon le code du travail, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi de reclassement, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi.

En l’espèce l’avis d’inaptitude mentionne expressément que l’état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans l’emploi. La salariée reprochait néanmoins à l’employeur de ne pas avoir respecté son obligation en soutenant que cette mention ne le dispensait pas de rechercher un reclassement au sein des entreprises du groupe.

La Cour de cassation estime que la dispense vaut dans l’entreprise mais également dans le groupe.

Cass. soc., 8 février 2023, n°21-19.232

L’employeur n’est dispensé de chercher un emploi de reclassement au bénéfice du salarié déclaré inapte que si le médecin du travail a expressément indiqué, dans son avis d’inaptitude, que l’état de santé de l’intéressé fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, et non dans l’entreprise.

Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-19.232 

Arrêt maladie et pratique d’une activité sportive :

L’exercice par un salarié d’une activité sportive, durant son arrêt maladie, sans aggravation de son état de santé, ne cause pas à son employeur un préjudice justifiant sa révocation du fait d’un manquement à l’obligation de loyauté, peu important le paiement intégral de son salaire.

L’exercice d’une activité pendant un arrêt de travail provoqué par la maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l’obligation de loyauté qui subsiste pendant la durée de cet arrêt.

Pour constituer un tel manquement et justifier le licenciement, cette activité doit avoir causé un préjudice à l’employeur ou à l’entreprise.

Cass. soc. 1-2-2023 n° 21-20.526

Renouvellement de la période d’essai :

Le renouvellement de la période d’essai n’est possible que si cela est prévu par accord de branche étendu et par le contrat de travail.

En sus, le salarié doit consentir de manière claire et non équivoque à ce renouvellement.  Cela se manifeste généralement par la signature d’un avenant au contrat dans travail.

Dans cette affaire, la période d’essai est renouvelée puis rompue par l’employeur un mois après le renouvellement.

Le salarié avait simplement signé la lettre de renouvellement sans autre mention et en contestait la validité en précisant qu’il n’avait pas consenti de manière claire et non équivoque.

Sa demande est rejetée. Les juges s’appuient sur des éléments complémentaires à la seule signature pour établir qu’il avait bien consenti au renouvellement. Il s’agissait, en l’occurrence, de courriels adressés à des recruteurs par l’ancien salarié, dans lesquels il indiquait « que sa période d’essai au sein de la société avait été prolongée et qu’il était en recherche d’emploi ».

 Cass. soc., 25 janv. 2023, n°21-13.699

Licenciement économique et critères d’ordre :

C’est à l’employeur, en cas de contestation sur l’application des critères d’ordre, de communiquer au juge les éléments objectifs sur lesquels il s’est appuyé pour arrêter son choix.

En cas de licenciement économique collectif, l’employeur définit, lorsqu’ils ne sont pas fixés par accord collectif, les critères permettant de déterminer l’ordre des licenciements.

Sont notamment à prendre en compte :

  • les charges de famille,
  • l’ancienneté,
  • la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile
  • les qualités professionnelles

Si l’employeur peut pondérer ces critères ou en ajouter d’autres, la liberté n’est pas totale.

En effet, il lui est impossible d’écarter les critères légaux ci-dessus et le montage opéré par l’employeur ne doit pas conduire à une application déloyale des critères.

Cass. soc. 18-1-2023 no 21-23.796

Refus de congé paternité et présomption de polygamie

L’employeur se rend coupable de discrimination en refusant d’octroyer un second congé de paternité et un second congé de naissance à un salarié deux mois après le bénéfice de tels congés dans le cadre d’une première naissance, en raison de la supposée polygamie de l’intéressé.

Le principe général d’interdiction des discriminations est régi par les articles L 1132-1 et suivants du Code du travail qui prévoient, notamment, qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison de divers motifs interdits parmi lesquels figure la situation de famille.

CA Toulouse 16-12-2022 n° 21/01896

Horaires individualisés et décompte du temps de travail

Pour des salariés de sites différents mais soumis au même horaire collectif, l’employeur n’a pas à tenir un décompte individuel de la durée du travail

En effet, l’obligation pour l’employeur d’établir un décompte de la durée de travail pour chacun des salariés ne vaut que s’ils ne sont pas soumis à un même horaire collectif.

Et ce, qu’ils travaillent ou non sur le même site.

CE, 1ère-4ème ch. réu., 1er févr. 2023, n° 457116

Newsletter sociale – décembre 2022

AU SOMMAIRE


Projet de Loi Marché du travail

Le 15 décembre 2022, le Conseil constitutionnel, a jugé conforme à la Constitution les dispositions de la loi « portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein-emploi ».

La loi devrait être publiée au Journal officiel d’ici peu.

Néanmoins, nous restons dans l’attente de décrets d’application pour l’entrée en vigueur des mesures prévues.

Pour rappel les principales nouveautés sont les suivantes :

  • Présomption de démission en cas d’abandon de poste
  • CDD multi remplacement : possibilité pour les entreprises de certains secteurs de conclure un seul contrat à durée déterminée pour remplacer plusieurs salariés absents, soit simultanément soit successivement
  • Election du CSE : permettre d’inclure les salariés représentant l’employeur dans le corps électoral des élections du CSE et les maintenir exclus du droit d’éligibilité
  • Ouverture de la VAE à toute personne qui justifie d’une activité en rapport avec le contenu de la certification visée
  • Réforme de l’assurance chômage avec notamment la suppression du bénéfice de l’assurance chômage en cas de refus de deux CDI.

Nouvelle augmentation du SMIC

Le Smic va être revalorisé de 1,80 %. Le nouveau montant du Smic brut horaire sera donc porté à 11,27 € au 1er janvier 2023, soit 1 709,32€ mensuels sur la base de la durée légale du travail de 35 heures hebdomadaires.

Aide à l’embauche d’alternants

« Une aide d’un montant de 6 000 € sera versée à toutes les entreprises, pour les contrats conclus avec un alternant, mineur comme majeur, du 1er janvier au 31 décembre 2023, pour la première année d’exécution du contrat » annonce le communiqué ministériel en date du 1er décembre 2022.

Les entreprises se verraient ainsi accorder 1 000 € en plus au titre des embauches d’alternants mineurs et 2 000 € en moins au titre des alternants majeurs, l’aide s’élevant actuellement et respectivement à 5 000 € et 8 000 €.

L’objectif est que le maintien de ces aides à un niveau élevé permette de poursuivre la croissance du nombre d’alternants et d’atteindre l’objectif d’un million de nouveaux apprentis par an d’ici la fin du quinquennat.

Contester une inaptitude

Le salarié ou l’employeur peut saisir le conseil de prud’hommes selon la procédure accélérée au fond (appelée procédure « en la forme des référés » jusqu’au 1er janvier 2020), d’une contestation :

  • portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L. 4624-2 (avis d’aptitude réservé aux salariés bénéficiant d’un suivi médical renforcé), L. 4624-3 (propositions de mesures individuelles d’aménagement du poste de travail) et L. 4624-4 (avis d’inaptitude) du code du travail
  • dans un délai de 15 jours à compter de leur notification.

Passé ce délai de 15 jours, la contestation devant le conseil des prud’hommes est irrecevable.

Même si l’employeur demande des précisions complémentaires au médecin du travail sur la portée de l’avis d’inaptitude et notamment sur le reclassement possible du salarié, le délai de 15 jours reste décompté à compter de la notification de l’avis du médecin du travail ; il n’est pas reporté à la date de la réponse du médecin du travail.

Attention, à compter de la date de déclaration d’inaptitude, l’employeur dispose d’un mois pour reclasser ou licencier le salarié. A défaut, il doit reprendre le paiement du salaire

L’action en contestation devant le conseil de prud’hommes ne suspend pas ce délai.

Il est donc souvent inopportun d’agir sur ce motif.

Aussi, et dans un récent arrêt, la Cour de cassation précise que le non-respect de la procédure du constat de l’inaptitude par le médecin du travail prévue par l’article R. 4624-42 du code du travail ne suffit pas à remettre en cause l’avis d’inaptitude mais que c’est un élément pris en compte par les juges du fond, en cas de contestation, pour ordonner, le cas échéant, une mesure d’instruction afin de vérifier si l’avis d’inaptitude du salarié à son poste prend en compte notamment les conditions de travail.

Pour rappel, le médecin du travail ne peut déclarer un salarié inapte à son poste de travail qu’après avoir réalisé un ou plusieurs examens médicaux, procédé ou fait procéder à une étude de poste et des conditions de travail et après avoir échangé avec le salarié et l’employeur.

Parlons coiffure

Le fait pour un employeur de restreindre la liberté de ses salariés de sexe masculin dans leur façon de se coiffer constitue-t-il une discrimination fondée sur le sexe ?

C’est la question que vient de trancher la Cour de cassation, dans un arrêt du 23 novembre.

Un steward travaillant pour une compagnie aérienne se présente à l’embarquement coiffé de tresses africaines nouées en chignon à l’embarquement. Son employeur lui refuse l’embarquement au motif qu’une telle coiffure n’est pas autorisée par le manuel des règles de port de l’uniforme pour le personnel navigant commercial masculin.

La Cour de cassation rend une décision en se fondant sur le principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail.

Elle en déduit que « l’interdiction faite à l’intéressé de porter une coiffure, pourtant autorisée par le même référentiel pour le personnel féminin, caractérisait une discrimination directement fondée sur l’apparence physique en lien avec le sexe ».

Cette différence de traitement n’est justifiée par aucune exigence essentielle et déterminante propre à l’exercice de la profession de steward.

Le saviez-vous ?

La seule absence de titre de séjour ne justifie pas une mise à pied conservatoire non rémunérée.

L’employeur qui notifie à un salarié étranger en situation d’emploi illicite son licenciement pour défaut de titre de séjour, sans invoquer à l’appui de ce licenciement de faute grave, est redevable à l’égard de l’intéressé du paiement du salaire pour la période antérieure à la rupture du contrat de travail.

L’irrégularité de la situation d’un travailleur étranger constitue nécessairement une cause objective justifiant la rupture de son contrat de travail, celle-ci étant exclusive de l’application des dispositions relatives aux licenciements et de l’allocation de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En revanche, elle n’est pas constitutive en soi d’une faute grave privative des indemnités de rupture, sauf fraude du salarié.